13/03/2019
DECOUVERTE POETIQUE: ARTHUR BILLEREY
Pour sa flamme et son allant, on pense
à Maïakovski et à Rimbaud, bien sûr.
Mais non, c'est Arthur Billerey.
Qui est cet Arthur B. dont la poésie est à la fois penchée sur lui et tournée vers les autres ?
Il y a de la fraîcheur et de la profondeur, du rythme et de la musicalité, dans ses textes. On ne s’étonnera pas de savoir qu’Arthur Billerey aime Prévert autant qu’Aragon.
Car ce poète généreux aime jouer avec les mots et observer le monde et la vie comme ils vont ou pas. Assurément, il ne passe pas son temps à méditer sur son ego. Bien heureuse de l'avoir rencontré.
Mais lisez plutôt!
«En y réfléchissant un peu
je me suis dit tête en l'air
les airs sont dans la nature
en soufflant dessus ils vont
d'une capitale à une campagne
franchissant champs et routes
en respirant certains c'est fou
la montée de la sève en nous
ne s'arrête jamais de monter».
Arthur Billerey, poète et responsable éditorial à L'Aire,
les yeux brûlant de Poésie.
«Je suis ce que je rencontre
au fil des jours mais aussi
ce que je rencontre éteint
en dormant j’ai un nom d’emprunt
que le matin récupère
souvent à couteaux tirés
quand je n’ai plus d’identité
j’en cherche une étrangement…
chaque jour a sa bousculade
de rencontres sa montre oubliée
au poignet de l’éternité qui va
rien que de roulade en roulade
je suis ce que je prends à l’un
et à l’autre ce que je rends
ce qu’il reste à mi-chemin
est un immense feu de camp
solitude cousue de fils blancs
qui entièrement se défileront
aux quatre coins du firmament
brille la sueur de nos fronts
Je suis ce que j’ai du mal
à comprendre la raison
de la guerre et la paix
de raison l’âme enfouie…»
* A l’aube des mouches, Editions de L’Aire, collection Métaphores, préface Corinne Desarzens, 104 p.
18:08 Écrit par Gilberte Favre dans Culture, France, Humour, Lettres, Monde, Musique, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0) |
24/02/2019
LA MEDITERRANEE TRAGIQUE D'AUJOURD'HUI
Sous une élégante et sobre jaquette,
les Editions de L’Aire viennent de publier
La Méditerranée tragique d’aujourd’hui de Salah Stétié.
Un thème d’actualité analysé par un grand poète libanais aujourd’hui nonagénaire
qui a connu sa patrie
des temps lumineux aux temps obscurs.
Né au Liban sous le Mandat français, professeur, critique d’art, il assuma des responsabilités diplomatiques et gouvernementales lors de la Guerre de 1976-1991. Les guerres n’ayant pas ménagé sa patrie, Salah Stétié exprime une sorte de désarroi. «Chacun, de sa larme secrète, arrose une fleur connue de lui seul» écrira-t-il songeant à ce pays des Cèdres sacrifié sur l’autel des querelles suicidaires et internationales.
Salah Stétié photographié à New York par Caroline Fourgeaud-Laville.
Un avant-propos remarquable
Signées Louis de Saussure, les lignes qui précèdent le texte du Libanais sont éclairantes.
«La Méditerranée, rappelle le jeune auteur genevois, est le creuset de notre monde, notre centre névralgique, nos unions belles et difficiles, nos vents et nos marées; comme elle vibre, ainsi nous vibrons aussi. A elle seule, elle suffit à évoquer l’humanité toute entière…»
Louis de Saussure a rencontré Salah Stétié à Athènes «un soir d’or» surplombant le Parthénon. Ils s’étaient d'abord connus autour du post d’un réseau social montrant un extrait de Baisers volés où joue Delphine Seyrig...Delphine Seyrig, née à Beyrouth et fille du grand ami de Stétié, l’archéologue français Henri Seyrig et d’Hermine de Saussure, la navigatrice genevoise arrière-arrière-petite-fille de Horace-Bénédict de Saussure et lointain parent de Louis.
Un jour à Byblos, Henri Seyrig, qui devait notamment fonder l’Institut français du Proche Orient, rencontra Miette de Saussure. Bientôt, ils se marièrent et les Seyrig devinrent amis avec Georges Schéhadé et Salah Stétié parmi d'autres artistes.
Du Liban sous le mandat français à aujourd’hui
Mais rien n’est figé dans le temps.
«En 2015, les guerriers du soi-disant «Etat islamique» dynamitent le temple de Bel à Palmyre», édifice qui avait été mis au jour par Henri Seyrig.
Un an plus tard, Stétié était à Neuchâtel, où Seyrig est décédé en 1973, afin d’y lire à la Faculté des lettres et sciences humaines, le texte aujourd’hui publié par L’Aire. Salah Stétié rêvait de voir son recueil «d’inspirations et stratégies» publié en Suisse, «ce pays qui a déclaré la paix au monde». Grâce à Louis de Saussure, qui en fut l’heureux récipiendaire, le rêve du poète libanais est devenu réalité.
«Texte ample et puissant, d’une grande beauté, La Méditerranée tragique d’aujourd’hui nous parle avant tout de nous-mêmes et de notre avenir, puisque cette mer baigne nos esprits depuis toujours, que nous le voulions ou non», explique Louis de Saussure.
Et de préciser: «Le Liban est un concentré de la Méditerranée: religions entremêlées, amitiés cosmopolites, ententes fragiles, explosions insensées, mais qui fut un temps prospère, temps paisible dont Stétié porte encore le deuil discret».
Salah Stétié n’est pas le seul à porter le deuil de ce pays suspendu entre cèdres et Méditerranée, et que nous avons tant aimé...
Le Liban (ici, près de Bécharré) lors d'un temps prospère et paisible...
Photo: Gilberte Favre
* Editions de L’Aire, collection Le banquet, 106 p.
15:18 Écrit par Gilberte Favre dans Culture, Genève, Histoire, Lettres, Monde, Politique, Solidarité, Voyages | Lien permanent | Commentaires (0) |